Au matin du 5 novembre 1982, il est 9h30 lorsque le vol QK833 se pose à Finkenwerder (Hambourg). Il s'agit du F-BPPA, Guppy n°2 qui vient chercher un tronçon "16/19" , la partie arrière d'un A300. L'appareil est dirigé à l'écart de la piste, le long du bâtiment n°7. L'ouverture et le chargement se font suivant les procédures UTA.
Il est 10h40 lorsque le chargement est terminé. Le chariot élévateur encore en place, le mécanicien navigant se dirige vers l'arrière pendant que le copilote se trouve dans le cockpit pour préparer le vol de retour. Le commandant de bord se trouve alors au bureau des vols pour l'établissement du plan de vol de retour vers Lille.
Il est 10h45 lorsqu'un bref et violent coup de vent se fait sentir. Assis dans le cockpit, le copilote sent le nez osciller et songe à en avertir le mécanicien navigant, lorsque le nez bascule vers l'avant.
La charnière vient de se briser, et le nez est tombé, écrasant le radôme au passage.
Le deuxième arrachage de porte |
Le copilote est indemne et peut sortir de l'avion par ses propres moyens. Averti le commandant accourt pour constater les dégâts et mettre l'avion en sécurité (immobilisation des roues, démontage de la batterie de bord). Les équipes de MBB vont également tendre des câbles en acier entre le nez et le fuselage pour éviter tout mouvement supplémentaire susceptible d'aggraver les dégâts.
Dépêchés sur place, les ingénieurs d'UTA ne peuvent que constater que la charnière est à changer et que les faisceaux de câbles doivent être vérifiés et de nombreux fils sont à changer ! Au niveau structurel, la pointe avant et le radôme vont nécessiter de nombreuses réparations.
La première priorité est de redresser la porte. Cette action est entreprise en deux temps : une grue va d'abord soulever l'ensemble avant pour le faire reposer sur le train avant, et dans un second temps, l'ensemble sera basculé pour le remettre face au fuselage. Les deux ensembles sont ensuite boulonnés pour que l'avion puisse être déplacé.
Seuls les faisceaux de câbles tiennent les deux parties ! |
Après le redressement de la porte, le Guppy sera placé dans un hangar et les réparations commenceront le 11 novembre, avec une vingtaine de spécialistes d'UTA et de MBB. Les réparations s'étaleront du 11 au 16 novembre (rapide lorsque l'on constate l'étendue des dégâts !) cette phase étant suivie de cinq jours de tests pour vérifier l'intégrité des circuits électriques. L'appareil sera finalement remis en ligne le 22 novembre, pouvant enfin ramener le tronçon arrière tant attendu à Toulouse !
Analyse de l'incident
Une enquête est rapidement menée pour comprendre l'évènement et trouver des solutions pour qu'il ne se reproduise plus. Les trois premières constatations sont les suivantes :
- La procédure d'ouverture et de chargement était en tout point conforme au manuel d'exploitation.
- Le vent relevé par la tour de contrôle était largement dans les limites.
- Contrairement à l'incident de Madrid, la roue avant était immobilisé et de ce fait n'a pas bougée.
L'examen de l'avion permet d'établir qu'il était stable et horizontal au moment de l'accident. La partie arrière de la charnière (solidaire du fuselage) est intacte, en revanche, sur la partie avant "l'oreille" est cassée en deux endroits au niveau des trous de fixation pour le maintien de la rotule. Toute les cassures sont nettes, et ne présentent aucun signe de fatigue du métal.
Vue latérale de la charnière (en haut) et longitudinale (en bas) |
Ces éléments montrent sans équivoque que le nez à basculé vers l'avant. Or le basculement vers l'avant ne peut avoir pour origine qu'une force aérodynamique résultant d'un vent soufflant vers l'intérieur du nez, donc d'une direction locale différente de celle indiquée par la tour ; cette hypothèse est jugée plausible compte tenu des bâtiments importants situés autour du point de stationnement de l'avion (voir illustration ci-dessous) et induisant des variations locales de direction et de force du vent. Coincé entre quatre grands hangars, le Guppy subissait des vents de force et de direction différentes de celle mesurées par la tour. Des études réalisés les jours suivants l'accident ont démontré que l'environnement près des hangars pouvait présenter des vents de force et de direction totalement différentes de ce qui était mesuré à la tour de contrôle.
Position du Super-Guppy au moment de l'accident |
- définir sur chaque aéroport une zone à l'écart des bâtiments pour l'ouverture/fermeture du nez.
- orienter systémmatiquement l'appareil pour que le vent souffle sur le travers gauche, pour éviter qu'une faible variation de vent ne vienne souffler à l'intérieur du nez.
- ne pas renforcer la charnière, qui a joué le rôle de fusible en protégeant la structure de dommage plus importants.
- de mieux définir la position du centre de gravité du nez pour mieux prévoir les risques de basculement.
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