jeudi 27 septembre 2012

Commandes de vol

Tout est "à l'ancienne" sur le Guppy, je pense que je l'ai suffisamment répété..et les commandes de vol n'échappent pas à la règle.
Comment contrôler un avion de la taille du Guppy ? Il faut des commandes de vol par câbles...et en fait c'est tout ! En effet, sur le Guppy on ne trouve ni pilote automatique, ni assistance mécanique ou hydraulique : tout se fait "aux muscles" ce qui en fait un avion fatigant à piloter. Ceci explique la taille très imposante du volant de commande des pilotes (plus de 80cm de large) ainsi que son grand débattement (les expressions manche contre soi ou manche au tableau prennent tout leur sens)

Les surfaces de contrôle de vol du Guppy n'ont rien de particulier. Deux ailerons sur les ailes, deux surfaces horizontales et une surface verticale au niveau de la dérive, permettant le contrôle sur les trois axes.

Les surfaces de vol du Super-Guppy

Chaque surface mobile est équipée d'un "tab". Le rôle de ce tab est de fournir l'équilibrage - ou trim - de l'appareil. L'équilibrage consiste à modifier la position des surfaces mobiles pour contrer la tendance à piquer ou à cabrer de l'avion en cas de centrage trop avant ou trop arrière. L'avion est équilibré lorsque, si le pilote lâche le manche, l'avion reste sur sa trajectoire de vol. Le réglage se fait par des volants de manœuvre dans le cockpit. A noter que de nos jours le trim a disparu sous cette forme, et est contrôlé informatiquement par les surfaces de vol.

Côté cockpit, on trouve deux volants de direction et deux jeux de palonniers pour les pilotes, ainsi que des volants de réglage du trim situés sur le piédestal entre les pilotes.

Un autre système permet le blocage des commandes de vol lorsque l'avion est au sol, ce qui empêche les gouvernes de bouger sous l'effet du vent. Ce système est commandé via une barre dans le cockpit, face à la console pilote.

Sous le plancher du cockpit, un ensemble de tringlerie et de poulie permet de contrôler des câbles en acier qui courent le long de l'appareil jusqu'aux surfaces de vol.

vue des poulies de renvoi des câbles de commande sous le cokpit
La liaison manche-ailerons (comme toutes les autres liaisons) est une commande directe par câble. Des systèmes de renvois soigneusement étudiés permettent de multiplier l'effort fourni par le pilote, mais le pilotage reste effectué "au muscle"

Pour vous donner une idée, en cas de décollage par fort vent, il était nécessaire que les deux pilotes contrôlent le manche pour tenir l'avion fermement.

Pour contrôler les ailerons, les câbles actionnés par le manche passent sous le plancher du cockpit, puis sous le plancher de la soute principale, en traversant les cadres de la station 300 où se situe le système de blocage et de déconnexion rapide. Il y a un total de quatre câbles, deux actionnés par le manche pilote et deux par le manche copilote. Les câbles courent ensuite toujours sous le plancher de la soute principale, dans un espace ménagé entre le réservoir de carburant central et le plancher.

Les câbles aboutissent enfin à la cloison arrière du réservoir de carburant où se trouve un tambour de renvoi sur lequel sont montés deux autres jeux de câbles, un pour chaque aile.

Vue de la cloison arrière du réservoir central. 1 : tambour de renvoi des ailerons 2 : tambour de renvoi du trim

Tambour de renvoi des câbles


Ces derniers câbles sont situés dans l'aile et aboutissent aux actionneurs des ailerons.

On notera que du manche jusqu'au tambour, tout est doublé, de telle sorte que la défaillance d'un câble ne remet pas en cause le contrôle des ailerons. En revanche, du tambour aux ailerons il n'y a plus de redondance, ce qui pose un risque. En réalité, si une défaillance se produit, l'avion reste contrôlable en jouant sur la puissance moteur et le trim (solution loin d'être idéale, mais courante à l'époque). De plus, des contrôles réguliers permettaient de s'assurer du bon état de l'ensemble du système avant les vols.

Synoptique de contrôle des ailerons

Autre point important : le réglage. Les câbles sont en acier, ils sont donc sensibles aux variations de température sur de longues distances. On arrive sur des longueurs de câble assez importantes, pouvant atteindre 35-40 mètres, donc la dilatation des câbles n'est pas négligeable.

Pour assurer un débattement complet des gouvernes, il faut que la tension des câbles soit ajustée correctement, or celui-ci va dépendre de la longueur du câble et donc de la température extérieure ! Comme on le voit ce système demande beaucoup de réglages et d'entretien, mais était courant jusqu'à l'apparition des commandes de vol numériques.

lundi 24 septembre 2012

Peintures de Guppy

Les Super-Guppy ont été peints de manières différentes au cours de leur histoire chez Airbus. Pour le scrap-book présentant les différentes variations, voir ici.

Le premier Super-Guppy fut peint aux couleurs d'Aerospacelines lors de sa fabrication et pour ses essais en vol. L'appareil n'était pas peint, mais polishé, avec un aspect argent très brillant. Deux grandes bandes rouges et jaunes couraient le long du fuselage, avec la zone autour des vitres du cockpit peinte en noir. La mention Aerospacelines inc était marquée au dessus des bandes du fuselage.

La livrée ASI qui sera applquée aux Super-Guppy 1 et 2


Une fois vendu à Airbus, il sera entièrement redécoré d'une nouvelle livrée crème et rouge. La fuselage comportait une grande bande rouge entourée de deux bandes couleur crème, avec les mentions "AIRBUS INDUSTRIE" et "AEROMARITIME" qui exploitaient l'avion. La dérive était peinte couleur crème, avec une grande bande rouge horizontale comportant le logo Airbus d'un côté et de l'aéromaritime de l'autre.

La livrée Airbus originale du F-BTGV

Le F-BPPA, Guppy n°2 aura un chemin un peu différent. Peint lui aussi dans la livrée d'Aerospacelines, il gardera cette livrée chez Airbus, avec juste quelques changements mineurs, les mentions ASI et Aerospacelines étant remplacés par Airbus et Aéromaritime.


Dans un souci d'homogénisation, le F-BTGV sera repeint avec les mêmes couleurs que le F-BPPA, retrouvant ainsi une partie de ses couleurs d'origine.

Les Super-Guppy n°3 et n°4 ont porté la livrée "arc en ciel" d'Airbus Skylink dès leur fabrication. Ce schéma de peinture a ensuite été appliqué aux deux premiers Guppy pour uniformiser la flotte.

La livrée "arc en ciel" Airbus-Skylink

Reprenant les couleurs Airbus de l'époque, ce schéma consistait principalement en quatre bandes de couleurs (de bas en haut : jaune orange rouge et bleu) courant le long du fuselage, surmontées de la mention "Airbus Skylink" en bleu sur les flancs. Le numéro de série de l'appareil était rappelé en chiffres géants sur le nez et la dérive de l'avion.

Ce fut la dernière variation de peinture portée par les appareils d'Airbus. Le N°3 n'a jamais porté d'autres motifs, et le numéro 4 portera ces couleurs jusqu'à son départ pour les Etats-Unis en 1997.

A noter que le F-BPPA aura également droit à une décoration spéciale pour les 25 ans de Tracor (et donc d'Aerospacelines) qu'il gardera quelques temps. La décoration finira par être effacée...en partie. La mention "Super-Guppy" en orange subsiste encore aujourd'hui !


Pour le F-GEAI, dans un premier temps, la NASA s'empressera d'effacer les mentions "4" et "Airbus Skylink", donnant un peu un aspect d'avion volé à l'appareil qui n'était pas du meilleur effet.

Puis la livrée "arc en ciel" d'Airbus Skylink fut rapidement remplacée par une nouvelle livrée plus chatoyante rappelant les couleurs de l'agence spatiale américaine et du premier Super-Guppy : une base de bleu ciel et de blanc, ainsi que le polish brillant qui fait du Guppy un miroir géant en plein ciel.

Dernier détail : les américains ne manquant pas d'humour, le "S" de Super-Guppy a été peint sur la face avant de la trappe de train de la roulette de nez.

Le "Super"-Guppy

samedi 22 septembre 2012

Guppy scrap-book

Pas beaucoup de texte dans cet article...juste quelques photos pour illustrer les différentes livrées portées par les Super-Guppy au fil des ans.

N-211AS - F-BTGV



livrée ASI  (1971)

livrée Airbus-Aéromaritime  (1971 - 1978)

livrée Aéromaritime  (1979 - 1982)

livrée Airbus-Skylink  (1982 - aujourd'hui)



N-212AS - F-BPPA


livrée ASI  (1972 - 1973)

livrée Aéromaritime  (1973 - 1982)

livrée Airbus-Skylink  (1982 - aujourd'hui)



F-GDSG


livrée Airbus-Skylink  (1982 - aujourd'hui)


F-GEAI - N941NA


livrée Airbus-Skylink  (1983 - 1997)

livrée NASA-Airbus  (1997 - 1998)

livrée NASA  (1998 - aujourd'hui)

lundi 17 septembre 2012

Un chalet original


Samedi 27 mai 1967 : Il est 16h40 lorsque le Mini Guppy se pose sur l'aéroport du Bourget, au nord de Paris.

Tout autour de l'aéroport, c'est l'effervescence : l'édition 1967 du salon du Bourget ouvre ses portes le lundi matin, et il reste encore de nombreux détails à régler. Pour vous resituer le contexte, à cette époque il fallait aller au salon en bus ou en taxi, le RER n'ayant pas encore été inventé, mais la course de taxi coûtait 18F...et la récente ouverture de l'autoroute A1 promettait de diminuer le temps de trajet. On parlait aussi de construire un troisième aéroport parisien au nord du Bourget qui s’appellerait Paris-Nord, mais on murmurait qu'il pourrait aussi s'appeler Roissy...Charles de Gaulle était président de la république, mais n'avait aucune intention de donner son nom à un aéroport...

Retour au sujet de l'article : le Mini-Guppy. L'arrivée de cet énorme appareil va surtout permettre à Sud-Aviation d'installer son chalet pour le salon !


En effet, face à la demande de Pierre Jorelle à ASI pour que le Mini-Guppy soit présent au salon du Bourget de 1967, alors même que l'avion n'existait que sur le papier, Jack Conroy avait répondu "nous y serons" ! Par la suite, Sud-Aviation avait eu l'idée, pour le moins originale, d'installer son "chalet" à l'intérieur de la soute du Mini-Guppy.

Le Mini-Guppy est certes plus petit que ses deux grands frères, le Pregnant Guppy et le Super-Guppy de la NASA, mais il était le plus gros avion commercial américain à cette date. Il ne vient pas qu'en figuration : il servira de chalet pour la société Sud-Aviation, après installation d'un module intérieur composé de vitrines et de salles de réunion.

Sa soute n'est pas vide : il apporte un prototype du "salon volant" fabriqué par Budd company (fabricant de voitures de chemins de fer à l'origine). L'idée du salon volant est la suivante (inutile de rigoler, c'était très sérieux à l'époque) : permettre aux passagers de s'installer dans une sorte de salle d'embarquement pour patienter, située en centre ville. Un hélicoptère lourd viendrait ensuite hélitreuiller ce "salon volant" pour l'emmener à l'aéroport.

La mise en service devait avoir lieu sur l'aéroport de Los Angeles en 1970. Intéressant sur le papier (le temps de transport du centre ville de LA à l'aéroport passant de 45 min à 8 min) le concept ne décollera jamais. Difficile pour des passagers, même pressés, de se faire balloter au bout d'une élingue d'hélicoptère...de plus le coût de l'heure de vol d'hélicoptère n'est pas du même ordre de grandeur que celle en train.

Pour en revenir au Mini-Guppy, sa présence au salon de 1967 est un véritable tour de force : en effet, l'appareil est un avion neuf, et quand je dis neuf, c'est neuf de chez neuf. Il a fait son premier vol le 24 mai 1967…c'est-à-dire moins de trois jours avant son arrivée à Paris, le tout après un marathon de 6 mois pour le construire. Les ouvriers d'ASI ont passé de longues journées pour s'assurer que l'appareil serait prêt à temps. Envoyer un prototype qui a à peine fait son premier vol directement de l'autre côté de l'Atlantique est un brin risqué pour ne pas dire plus.

Renommé "Spirit of Santa Barbara" pour l'occasion (clin d'œil au Spirit of Saint Louis de Lindbergh, qui avait franchi l'Atlantique juste 40 ans auparavant) le Guppy sera une des stars du salon...surtout pour les observateurs russes. En effet, les russes hier, comme les chinois aujourd'hui, ont cette manie d'envoyer des dizaines d'observateurs qui arpentent le salon en notant absolument tout ce qu'il est possible de noter...

Vu aérienne du salon de Bourget de 1967...aujourd'hui, ça fait toujours rêver.. (et pour info, le Concorde n'est qu'une maquette). Le mini-Guppy est sur la droite avec sa queue ouverte.


A l'issue du salon, le Guppy retournera à Santa-Barbara pour commencer son programme d'essais en vol...après un détour sur Toulouse, qui permettra à Jack Conroy de rencontrer les responsables de Sud-Aviation, et de présenter l'atout que le Guppy pouvait représenter pour le programme Concorde...

vendredi 14 septembre 2012

Guppy-actu : un grand déménagement

Un convoi plus qu'exceptionnel ! (source : Ailes Anciennes Toulouse)

Alors même que le Guppy de la NASA se posait à El Paso (vendredi dernier) le F-BPPA, Super-Guppy des Ailes Anciennes Toulouse déménageait après une longue période d'immobilité. La collection des Ailes Anciennes est en train de déménager vers un nouveau terrain de manière un peu précipitée suite aux impératifs d'Airbus. Situé en face de l'usine Jean-Luc Lagardère où sont assemblés les A380, ce site va devenir la nouvelle maison des Ailes Anciennes.

Un passage près du parking des Beluga permet de prendre une photo exceptionnelle ! (source : Ailes Anciennes Toulouse)


Vendredi après-midi, le Super-Guppy a commencé le long voyage vers l'usine Jean-Luc Lagardère, avec l'aide des équipes Airbus et sous la surveillance des membres des Ailes Anciennes qui s'occupent de l'avion. Mais, contrairement aux autres avions de la collection, le Guppy n'ira pas jusqu'au bout de ce dernier voyage: il restera sur le site Airbus jusqu'à ce que le musée Aeroscopia soit prêt à l’accueillir, d'ici l'année prochaine si le planning est respecté.

Le départ s'est fait du terrain de Saint-Martin. Le convoi a ensuite remonté le long de l'usine et de l'aéroport de Blagnac, passant devant le parking des Beluga, avant de faire un arrêt pour passer au hall des pesées. En effet, pour préparer son installation au musée, il était nécessaire de connaitre son poids. Résultat : un peu moins de 50 tonnes.

En attendant qu'il bénéficie d'un point d'ancrage adapté, il stationne sur le parking A380...de ce fait, il ne semble plus aussi grand qu'avant ! D'ici quelques semaines, une fois ses points d'ancrage terminés, il rejoindra son nouvel emplacement en attendant que le musée soit près à l’accueillir.


La réalisation de points d'ancrage adaptés est une nécessité. En effet, le Super-Guppy a beau peser 50 tonnes, il reste un avion, et donc sensible au vent. Pour preuve, cet été, il a "tenté se s'envoler"...étant bien attaché, c'est le plot de fixation au sol qui a failli céder. Fort de cette expérience, il a été plus facile de convaincre Airbus du bien fondé d'attacher solidement le F-BPPA au sol pour éviter tout incident !

La grande (tentative) d'évasion
Même si il ne volera plus jamais, le F-BPPA trouvera ainsi une nouvelle maison où il pourra être protégé et où de nombreux visiteurs pourront le découvrir. Il sera également le seul Guppy abrité dans un musée, ce qui permettra aux visiteurs de le voir avec le nez ouvert. Il pourra ainsi témoigner aux générations futures des débuts de l'aventure Airbus.

Vidéo montrant une partie du voyage du F-BPPA de Saint-Martin à Jean-Luc Lagardère

jeudi 13 septembre 2012

Guppy-actu : Le N941NA reste actif comme jamais

Le Super-Guppy de la NASA, immatriculé N941NA, a connu un été très occupé : pas moins de 4 voyages très médiatiques pour livrer des simulateurs de navettes à différents musées.

Le 30 juin, il livrait la première partie de la maquette de familiarisation du fuselage au "Museum of Flight" de Seattle. Très médiatisé, ce vol sera suivi de deux autres, les 26 juillet et 9 Août (voir plus de photos) pour livrer le reste du simulateur.


Détails sur la mission de Dayton

Le 22 Août, il apportait un simulateur de cockpit de navette, cette fois pour le musée de l'US Air Force à Dayton dans l'Ohio. La NASA ayant fait beaucoup de publicité, une foule nombreuse attendait l'étonnant avion de pied ferme.


Vidéo de l'arrivée du vol à Dayton le 22 Août dernier

La NASA continue ainsi de tourner la page de l'époque navette spatiale en donnant ses anciens simulateurs à différents musées américains. Une fois cette livraison effectuée, le Guppy retourna à Ellington Field à côté du centre spatial Johnston au Texas.

Après quelques semaines à Ellington, il lui fallait rentrer à El Paso, sous le climat sec du soleil Texan, qui lui a été recommandé par les ingénieurs de la NASA pour limiter la corrosion de sa cellule.

Il est arrivé à El Paso vendredi dernier, marquant la fin d'un été particulièrement riche en voyages !