mardi 20 septembre 2011

L'histoire des Guppies (9)

Neuvième partie : Du Guppy au Beluga

La flotte d'Airbus comprenait Quatre Super-Guppy en 1983...et ils ne s'ennuyaient pas : il fallait presque 50 heures de vol en Guppy pour acheminer les éléments d'un Airbus jusqu'à Toulouse pour assemblage ! L'augmentation des cadences liées au succès de l'Airbus se traduisait par un rythme soutenu des vols de Super-Guppy !

La flotte presque au complet...il manque le GDSG !


En 1987, avec le lancement du programme A330/A340, de nouveaux problèmes apparaissaient : le poids des éléments à transporter approchait la masse maximale transportable par Guppy...ainsi que la taille maximale de la soute ! On approchait de la limite du Guppy, et il faudra même augmenter les tolérances de centrage vertical afin de pouvoir accueillir les tronçons d'A340. De même, le poids de la voilure du nouvel appareil était tel que le Guppy ne pouvait transporter qu'une seule aile à la fois : il faudrait donc deux allers-retours (et de nombreuses escales techniques) en Angleterre pour aller chercher une voilure complète ! Même le trajet Saint-Nazaire/Toulouse pour la section centrale allait nécessiter un arrêt intermédiaire à Bordeaux par temps chauds...

Caisson central d'A330/A340 : il fallait couper une partie des cadres arrière pour pouvoir faire tenir le tronçon dans le ventre du Guppy (et à cause de la largeur à l'emplanture des ailes, il n'était pas possible de le faire rentrer plus bas !)


En 1988, Airbus commença à envisager avec UTA la possibilité de construire un Guppy n°5 et peut-être même n°6, conscient que le système de quatre appareils ne tiendrait pas indéfiniment. Airbus souhaitait une estimation, en prenant la même organisation que pour l'assemblage des Guppy 3 et 4, du coût de fabrication d'un Guppy supplémentaire (n°5) ou de deux (n°5 et 6) ou alors d'un Guppy et fourniture d'un jeu d'ailes + nacelles moteurs de rechange en cas de besoin de remplacement sur un Guppy de la flotte, sans oublier les pièces de rechange pour assurer l'exploitation des Guppies jusqu'en 2010 !

Le problème était simple : UTA possédait un Boeing C-97 et des pièces de Stratocruiser, et pouvait donc fabriquer un Guppy n°5, mais il n'y avait plus aucune pièce pour faire un Guppy n°6, il faudrait les fabriquer à partir des plans d'origine de Boeing...quarante ans après la sortie du dernier Stratocruiser ! Le planning prévoyait une décision en juillet 1989, avec livraison du premier appareil mi-92.

Un état complet de la flotte fait en 1990 avait révélé d'importants problèmes de corrosion et de criques sur l'ensemble des appareils, notamment au niveau des ailes et des cadres de structure aux jonctions entre les pièces du C-97 et les extensions du Guppy.

L'état des appareils au 1er mars 1990 était le suivant :
  • F-BTGV : 16160 heures de vol (5550 comme C-97 et 10610 comme Guppy)
  • F-BPPA : 14240  heures de vol (4520 comme C-97 et 9720 comme Guppy)
  • F-GDSG : 13610 heures de vol (9290 comme C-97 et 4320 comme Guppy)
  • F-GEAI : 11950 heures de vol (8090 comme C-97 et 3860 comme Guppy)
La flotte demandait des soins constants de la part des équipes d'UTA. Les  pièces détachées devenant de plus en plus rares, la situation risquait de devenir critique dans les années à venir si rien n'était fait. Partant de ce constat, l'état major d'Airbus commença à prendre conscience qu'il faudrait peut-être trouver une alternative ou un remplaçant aux Guppies. C'est pour cela qu'une étude de faisabilité fut entreprise dès juin 1990 pour trouver un remplaçant au Super Guppy, prenant à contre-pied toutes les études en vue de construire un Guppy n°5 voire n°6 ! Construire un avion en prenant une cellule de presque quarante ans d'âge ne ferait tout simplement pas l'affaire : il fallait tout reprendre à zéro. A zéro ? Pas tout à fait : le concept du Guppy avait largement fait ses preuves, et il suffisait d'adapter le concept à une cellule plus moderne pour disposer d'un appareil plus récent.

L'avion de base retenu fut l'A300-600R, rentré en service en mai 1988, version à long rayon d'action de l'A300-600. L'étude de faisabilité se termina en avril 1991, donnant lieu à une note de synthèse dès décembre 1990, et une étude d'industrialisation, approuvée par Airbus : le projet de l'A300-600 Super Transporter pouvait débuter ! Afin de mener le projet à bien, une société sera même crée entre l’Aérospatiale et DASA : la Special Aircraft Transportation International Company (SATIC). Les choses allèrent vite : le premier appareil, surnommé Béluga, fit son premier vol le 13 septembre 1994, et la certification fut accordée en octobre 1995. Quatre autres Beluga seront construits à raison de un par an.

La relève arrive


Les Guppies pouvaient à présent partir en retraite, après plus de 25 années de bons et loyaux services. Le F-BPPA effectua son dernier vol commercial le 15 mars 1996 en atterrissant à Toulouse, il totalisait 14110 heures de vol et 6261 atterrissages. Il ne devait jamais plus quitter Toulouse. Peu de temps après, le 30 avril, le F-BTGV arrivait à Bruningthorpe en Angleterre, après 15060 heures de vol et 6729 atterrissages.

F-GEAI, l'appareil le plus récent de la flotte, fut donné à l'ESA, l'Agence Spatiale Européenne, laquelle le céda immédiatement à la NASA en échange d'un certain nombre d'heures de vol à bord de la station spatiale internationale. Il fut livré à Houston le 23 octobre 1997.

Enfin, F-GDSG quitta Toulouse pour Finkenwerder via Bristol le 24 octobre 1997 afin d'être exposé devant le quartier général de DASA. Il s'agissait du dernier vol d'un Super-Guppy pour le compte d'Airbus.

Ainsi s'achevait l'épopée des Guppies pour Airbus, mais aujourd'hui encore, le F-GEAI a changé d'immatriculation pour devenir le N941NA et il vole encore pour le compte de la NASA.

Repeint et étincelant, l'ex F-GEAI vole encore aujourd'hui !


 


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